Petite ballade nocturne

Rien de tel qu’une petite balade nocturne sur une plage plongée dans la nuit noire, avec la lancinante musique des vagues de l’Atlantique, pour retrouver sa juste place dans l’Univers.

Il faut profiter de l’exercice pour jeter à la mer toutes ses pensées bruyantes, ses préoccupations angoissantes, ses beaux mais vains projets dont peu verront le jour, la liste inutiles des petites choses à faire et des émotions encore à vivre.

Tout balancer à l’océan. Si l’on s’y prend bien, avec quelques années d’expérience, on sait que peu de choses survivra au naufrage volontaire de tout ce bardas bien encombrant qui emprisonne nos vies et étouffe notre joie de vivre.

Une fois allégé et revenu à notre condition primaire, à notre être essentiel, alors, on peut se mettre au travail. Il suffit de s’assoir par terre, de s’échouer dans le sable et de lever les yeux. Un bon verre de vin ou une flasque de whisky peuvent-être des compagnons utiles.  

Alors, enfin surgit alors le grand spectacle de l’Univers, la seule réalité qui s’impose à nous autres, petits êtres humains, si gonflés de notre illusoire importance et si peu dignes de cette vie qui nous est offerte, que nous vivons pour la plupart (et je m’inclus naturellement dans le lot) en purs amateurs, en parfaits inconscients ou en sauvageons indélicats.

Contrairement aux apparences, un homme ne peut discerner dans chaque hémisphère qu’un nombre extrêmement limité d’étoiles. En moyenne, 3000 objets stellaires par hémisphère. Sans doute davantage dans l’hémisphère sud qui est orienté vers le centre de la Galaxie, offre une meilleure vue sur la voie lactée et permet parfois de discerner le Petit et le Grand nuage de Magellan. Avouez qu’on est bien loin des 200 milliards d’étoiles que compte notre Galaxie. Qui sommes-nous, dans cette nanoseconde que dure finalement notre existence humaine, plongés dans le hasard de ce vide intersidéral, composée de plus de 30.000 milliards de galaxies à ce jour estimées, et face à ce temps éternel qui défie l’entendement ?

Je repense souvent à cette phrase de Jodie Foster qui joue le rôle d’une astrophysicienne, dans le film intitulé « Contact » qui, en contemplant l’Univers, sort cette magnifique réplique : « Si nous sommes seuls dans l’Univers, quand même, quel gâchis d’espace ! ».

Sur cette plage plongée dans la nuit fraiche, je savoure la dizaine de jours qui s’égrènent avant mon retour en France, délaissant l’automne uruguayen pour aller célébrer le printemps français et les retrouvailles avec tous ceux qui sont finalement essentiels à ma survie dans cette valse du temps.

Je ne peux m’empêcher de faire un parallèle entre ces milliers d’étoiles et les 6651 contacts que dénombre visiblement mon carnet d’adresse, et qui s’affichent fièrement sur mon téléphone. 

Parmi eux, combien de Galaxies disparues, appartenant à la nuit de mes vies passées ? Combien d’étoiles qui ne furent que filantes et d’astres fugaces qui s’éteignirent si promptement dans le vide de mes désirs assouvis ou de mes intérêts satisfaits ? Combien de planètes mortes et désormais inconnues, sorte d’astéroïdes mus par leur propre trajectoire et qui ne croiseront plus jamais ma Terre ? Et enfin, combien de planètes essentielles et précieuses compte mon propre système solaire, d’amis et d’amours que je vais revoir et célébrer comme il se doit, avant de disparaitre à nouveau, dans deux ou trois mois, vers une nouvelle mission spatiale, englouti à nouveau par un projet entrepreneurial qui ambitionne de sauver notre planète, à ma manière et à mon humble échelle !

En rebroussant chemin vers mon logis d’un soir, après avoir éclusé avec délectation ce vin chilien né sous le même ciel étoilé face auquel je ressuscite, je repense à ce vers de Nietzsche, qui m’accompagne souvent : 

“Il faut porter du chaos en soi pour accoucher d’une étoile qui danse.”

Alors, face à la litanie des pourquoi, des combien, des où, des pour qui, et des quand… Contentons-nous d’être des étoiles qui dansent et de toujours scintiller dans le cœur de ce qui nous aiment. Une joli manière de raccourcir l’Espace-Temps durant lequel nous avons le privilège et le devoir d’être magnifiquement vivant !

Publié par

Entrepreneur, écrivain et globe-trotter. L'homme le plus léger, le plus libre et le plus heureux du monde;-)

3 commentaires sur « Petite ballade nocturne »

  1. Bien jolie cette balade sous les étoîles. Bon retour parmi les tiens dans une si belle France qui mérite tellement mieux que le spectacle désolant que tu vas y trouver.
    Ghislaine

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  2. J’ai trouvé ce commentaire sur la phrase de Nietzsche :
    Le chaos dans les cosmogonies antiques est le vide primordial, obscur et sans bornes qui préexiste au monde. C’est aussi un synonyme de désordre, de confusion.
    Quand à l’objectif à atteindre, il n’est pas statique, c’est « une étoile dansante ». Par cette expression, Nietzsche fait l’éloge de la création et du mouvement.

    Aimé par 1 personne

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