Seul, sur ce fragment de monde à la beauté vertigineuse.
Ce bout de monde où la vie est une pente, une bourrasque de vent inamical, une tempête de neige incessante, une symphonie de silence, une crevasse sur le visage des habitants et une congère qui engloutit leur cœur minéral,
Bout du monde chatoyant comme une rivière de diamants serpentant dans un écrin de pâturages et d’insectes vibrionnant. Au loin, un concert de cloches bovines me rappelle la civilisation en contre-bas qui s’agglomère pour commercer et se rassurer.
Ce bout du monde neutre qui rappelle qu’aucune cime n’est jamais atteinte, fut-elle éternellement enneigée par un canon à rêves, que les plus grands sommets sont la copie conforme des abîmes de nos âmes citadines.
Le regard se perd dans les forêts de sapins et dans celles, intérieures et impénétrables, où l’enfance a laissé ses chemins de caillous blancs et toutes ces choses encore à accomplir.
Ici, jadis, des dieux immémoriaux réunis en cénacle ont élevé des montagnes qui ressemble à des temples. Puis il créèrent les hommes pour que ceux-ci les perfectionnent, bâtissent des cathédrales et les emplissent de foi. Nul besoin en ce lieu de vos églises dévotes, de vos minarets criards ou de vos synagogues rutilantes. Ici, la croyance est naturelle, omniprésente, humble et paysanne.
Les dieux sont là, facétieux et prolixes. L’un se cache dans la rosée scintillante de l’aube, l’autre joue à saute mouton sur le sommet de chaque brin d’air, on suit ses pas légers à la courbure soudaine de l’herbe.
Un autre encore se fige dans une rectitude coupable au milieu d’un bosquet sans savoir qu’il est trahi par le vol tournoyant d’une buse ou d’un milan plus malin qu’un vieux singe.
Et je suis là, sur le strapontin d’un rocher, aux premières places de l’orchestre à observer ces millénaires qui tentent d’amadouer une horde d’instants heureux…





Joyeux Noel au sommet du monde !
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