Avant que nous allions nous perdre quelques jours au cœur de la Pampa et de la forêt amazonienne, je vous invite à m’accompagner dans un lieu absolument époustouflant, situé à quelques encablures de la Paz, la capitale la plus haute du monde.
La Bolivie recèle de lieux comme ceux-ci, méconnus, sous-exploités, parfois difficile d’accès, et en dehors des sentiers battus ou des tartes à la crème touristiques. Je veux vous inviter sur ma selle arrière pour aller butiner la Valle de los Animas (la Vallée des âmes), à seulement une quinzaine de kilomètres à l’Est de la Paz.
Il faut avouer qu’elle se mérite. Rien ne l’indique. On y accède après s’être extirpé du dense trafic de la capitale, suivi d’une traversée de banlieues sans intérêt et s’être donné la peine de grimper au terme d’un long sentier de pierraille qui monte, qui monte vers cet invraisemblable temple minéral, formation géologique étonnantes située à l’horizon, posée à l’orient de la cité de la Paix. Lors de la saison des pluies, de décembre à mars, les intempéries deviennent des déluges dans cet entonnoir naturel sculpté durant des millénaires, par les eaux. Lorsque les cieux convoquent le vent pour signaler leur courroux, la Vallée devient un orgue gigantesque et une musique céleste et inquiétante descend sur le village d’Ovejuyo, qui s’agite et tremble en contre-bas.
Errer et se perdre dans ce lieu unique, c’est remettre l’humain à sa juste place et proportion. Nous ne sommes pas forcément les bienvenus, à condition d’y pénétrer avec humilité, de rechercher l’énergie tellurique des esprits qui résident dans ce sanctuaire orné d’une infinité de cathédrales des vents.
Plus on pénètre, en grimpant sérieusement, sur le sentier de caillasse qui se perd jusqu’à l’étourdissement dans la beauté des lieux, plus on se dit que ces hautes murailles, dominant la ville qui gît dans le lointain, est l’avenir de l’humanité. Un futur désertifié, sans trace de vie, austère et exigeant, dans lequel l’humain n’est qu’un détail incongru.
En redescendant, avec la conscience d’avoir vécu un moment hors du temps, d’avoir assisté en solitaire à un fragment magnifié de l’histoire géologique de notre planète, on ne peut s’empêcher de ressentir le message tacite que les esprits qui hantent ce temple minéral nous délivrent :
« Humains, si mal vivants, prenez de la hauteur, sortez de vos existences tissées de routines et d’objets. Réapprenez à prendre soin de cette Terre que vous portez en héritage. Elle est votre seul salut, l’unique théâtre de la grande aventure de Vivre, qu’il vous faut parvenir à savourer, avec délicatesse et respect, émotion et sincérité, durant votre si fugace existence. »














