Mais dans quel État j’erre ?

Je viens de recevoir une photo des rayons consacrés au Voyage dans une FNAC parisienne, qui me rappelle combien il est de notre devoir, autant que faire se peut, tant qu’il en est encore temps, d’être magnifiquement Libres et Vivants. 

Sans doute, n’écrit-on des livres que pour se rappeler que l’on est le témoin chanceux et privilégié de la plus belle série qui soit, du plus inspirant spectacle auquel il nous est donné d’assister, tantôt acteur, tantôt spectateur, mais souvent aux premières loges !

Cette série cinématographique ne se trouve pas sur Netflix, ni sur Amazon ou sur quelque canal qui nous enchaîne forcément à la télévision… Nul besoin d’abonnement mensuel ou de pass VIP pour y participer. Cette histoire fabuleuse se joue à guichet ouvert, au fond de nos cœurs, sous nos yeux, autant que derrière nos paupières, dans chaque battement de notre cœur, dans le flux continue de notre sang, comme un nœud fait à notre mouchoir, un signe qui nous rappelle au fond de nos poches encombrées d’insignifiance : « N’oublie pas de vivre ! ».

Le voyage autour du monde, qui se confond désormais avec chaque jour de ma vie, n’est qu’un moyen et un prétexte. Le véritable périple est intérieur. La plus belle des ascension est de progresser sur les pentes parfois verglassée de nos mondes intimes.

Je regarde une dernière fois cette image où mes deux livres pavoisent sur les étagères d’une librairie, non sans une certaine indécence, comme deux jeunes péripatéticiennes qui vanteraient leurs promesses de gambettes et d’évasion, à des lecteurs ayant des fourmis dans les jambes, le goût de l’Ailleurs et l’envie de s’envoyer en l’air dans le premier zingue qui passe.

Et comme le hasard fait bien les choses, je découvre quelques minutes plus tard, par un pur effet de la sérendipité, ce poème de la merveilleuse Andrée Chedid, qui me ramène à ma triste réalité de souteneur. Je me prostitue à longueur de kilomètres, prêt à vendre mon âme au diable pour un bon mot, un éclair d’inspiration ou un poème qui coulerait de source. Que ne suis-je devenu un proxénète de la langue française, en cavale depuis plus de quatre années, tentant d’échapper sans succès à toutes les polices de caractères, pour franchir les frontières de l’intime, en confiant mes pensées impudiques à mon propre Mac ! Un sacré maquereau celui-ci ! Père Macrelle de l’écrivain-voyageur qui fait les cent pas sur les trottoirs du bout du monde…

La parole est à Madame Chedid…

La vie voyage

Aucune marche

Aucune navigation

N’égalent celles de la vie

S’actionnant dans tes vaisseaux

Se centrant dans l’îlot du cœur

Se déplaçant d’âge en âge

Aucune exploration

Aucune géologie

Ne se comparent aux circuits du sang

Aux alluvions du corps

Aux éruptions de l’âme

Aucune ascension

Aucun sommet

Ne dominent l’instant

Où t’octroyant forme

La vie te prêta vie

Les versants du monde

Et les ressources du jour

Aucun pays

Aucun périple

Ne rivalisent avec ce bref parcours

Voyage très singulier

De la vie

Devenue

Toi.

— Andrée Chedid / Épreuves du vivant

Publié par

Entrepreneur, écrivain et globe-trotter. L'homme le plus léger, le plus libre et le plus heureux du monde;-)

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