J’ignore tout de l’avenir que les hommes s’évertuent à obscurcir
Aussi, serait-il folie d’écrire au futur, des mots qui ne sont que vaines prières
Même si je le veux, je ne peux ciseler la moindre phrase à l’encre sympathique de l’Espérance
Et serai bien incapable d’exprimer la moindre idée incandescente et lumineuse
Car je sais la coupable responsabilité qui pèsent sur nos frêles épaules d’êtres humains,
À force de promulguer de fausses promesses et d’évanescentes certitudes.
J’ignore tout du temps qui n’est plus, dont nous nous échinons à oublier les leçons
Pour le poète qui s’esquinte au contact du monde, le cœur balafré d’injustices
Jadis et Autrefois ne sont que de vieilles reliques qui sentent la trahison et souvent le moisi
Car voyager dans le temps lui a appris que le passé n’est jamais simple, parce que les hommes trop imparfaits
Et que les trente milliards d’âmes qui nous ont précédés n’ont que peu de poids sur ce passé promptement recomposé, par une seule génération : la nôtre
Je ne puis écrire d’histoires ou évoquer ce qui fut, quand je vois ce que sont devenus nos rêves de naguère
L’écrivain porte en lui un funeste constat et cette urne de cendres, seul souvenir du flamboyant bûcher sur lequel les mots Liberté et Fraternité, qui enflammèrent le cœur de nos plus vénérables anciens, finirent par s’éteindre dans les braises d’un passé refroidi
Je sais désormais que les mots, aussi, meurent, comme s’envolent nos rêves et nos croyances vers le poussiéreux tombeaux de toutes nos civilisations disparues.
Mais je n’ignore rien de ce temps présent, fugace et vivifiant, seule certitude qui danse dans mes veines et fait battre, à chaque seconde, mon cœur tambourinant
J’écris au présent la vie qui déboule en ayant qu’une fugace minute à nous consacrer et sur laquelle repose tous nos espoirs et se dessinent nos bilans et testaments
J’écris sur le vol espiègle des papillons, pour sauver le sourire des enfants, pour redonner vie au mot Liberté et une folle vigueur à notre Fraternité
J’écris avec la pluie des nuages, avec les crayons de couleur du soleil, avec nos larmes de fou-rire, en plongeant ma plume dans l’eau jaillissante des ruisseaux et la subtile lumière de l’aube
J’écris pour que l’on se souvienne, pour te dire et te promettre que l’on porte le poids du monde dans chacun de nos mots, et pour te rappeler qu’une seule, minuscule et silencieuse action, vaut toujours mieux que mille mots si vite engloutis par un passé vorace.
J’écris aussi pour enflammer les cœurs de ceux qui veulent reprendre le flambeaux, poursuivre le combat qui n’est jamais vain, qui regardent le monde avec lucidité et œuvrent comme des fous magnifiques pour sauver ce qui doit l’être.
J’écris pour Demain avec le sang d’encre d’aujourd’hui, pour cette vacillante flamme qu’on appelle l’Espoir et pour nos enfants qui seront, demain, nos juges et nos jurés, si nous ne faisons rien.
J’écris avec force pour dire le monde présent, pour que mon fils ait un futur et n’oublie jamais, grâce à nous, les leçons du passé, même s’il n’est pas parfait !





























